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30 Mar

La dernière région que j’ai mise à l'honneur. Le producteur ? Dominio Basconcillos, future star de l'appellation. 

Il y a un parti pris. Au lieu d’essayer d’identifier « un style » de vin qui plaît au plus grand nombre j’ai préféré, pour chaque appellation, mettre en avant le producteur qui, par son travail délivre des vins d’une qualité exceptionnelle. 


Je dois avouer que je ne suis pas peu fier.  Initialement rencontrés à la Wine Paris, j’ai tenu à me rendre chez eux afin de voir à quoi ressemblait leur travail de près. Si j’ai pu prendre quelques photos, il ne m’a pas été autorisé de les révéler, ordre des propriétaires. 


Il faut s’imaginer un plateau à haute altitude. Certes il ne s’agit pas des records que peuvent atteindre les vignoble Argentins (3000m et plus), néanmoins nous parlons ici de 960 mètres et son impact perceptible. 

Le principal cépage cultivé ici est le Tempranillo localement appelé Tinto Fino. S'il offre la possibilité de gros rendements à des fins de vin rouge fruité accessible, il constitue également le cépage phare dans la réalisation de certains des plus grands vins d’Espagne. Les rendements sont alors significativement réduits dès lors que la qualité est le but premier. 

Le Tempranillo mûrit tôt. Il est particulièrement adapté aux climats chauds jouissant d’influences rafraichissantes. La Ribera del Duero perchée entre 750 et 1000 mètres d’altitude est le client idéal. 

Le climat ici est continental. Journées très chaudes en été pouvant dépasser les 40°c sans trop de difficulté et nuits très fraîches. Grâce à ces nuits notamment le processus de dégradation des acides est ralenti tout comme la maturation des baies. Grâce à cette température moins élevée la nuit, les baies conservent une acidité qui plus tard jouera un rôle vital à l’équilibre du vin. La brise constante plus ou moins marquée (ça soufflait très fort le jour où je m’y suis rendu) est une bénédiction aux dires de l’œnologue du domaine avec qui je discutais alors. Tous les risques de maladies cryptogamiques sont réduits pratiquement anéantis grâce à cette brise. Elle permet par la même occasion de limiter drastiquement l’usage de phytosanitaire pour lutter contre ces maladies.

D’après le cahier des charges de la DO (Denominacion de Origen – l’AOC espagnole), le vin doit être composé à minima de 75% de Tempranillo cela peut aller jusqu’à 100%. Les 25% restants peuvent être complétés par les cépages suivants : Cabernet Sauvignon, Merlot, Malbec, Garnacha et Albillo (cépage blanc local supposé ramener de la fraîcheur au vin, néanmoins peu réalisé en pratique). 

Des contours bordelais affirmés (pour ce domaine notamment)



Les différences sont subtiles pour les meilleurs exemples. En effet les vins de la Ribera del Duero peuvent présenter des similitudes avec les vins de la rive gauche bordelaise. Violette, fruits rouges, fruits noirs, bleus, frais, croquants, cuits, suivis d’aromatiques issues de l’élevage en fût de chêne, clous de girofle, cannelle, vanille, toasté, parfois noix de coco. Le corps du vin s’inscrit presque tout le temps dans le scope intense, élevé, structuré pour les deux. Les acidités, les tannins, ont des tendances élevés.  Les textures au palais, veloutées, intenses, parfumées. 

Alors qu’est ce qui les différencie vraiment ? 

Tout est dans la nuance. 

  • Tempranillo VS Cabernet Sauvignon 

 Si les deux cépages présentent des similitudes, il n’en demeure pas moins qu’ils ont également chacun leurs propres spécificités.  L’aromatique du Tempranillo parcours l’ensemble du scope des fruits croquants murs au fruit noir confituré. En fonction des orientations, expositions, altitudes (et une multitude d'autres facteurs) le style varie. L’assemblage de différentes parcelles est commun afin d’équilibrer les raisins concentrés en sucres de ceux présentant plus d’acidité pour équilibrer l’ensemble. 

Le cabernet sauvignon, lui, présente toujours des arômes de fruits noirs, bleus, cassis, mûre cerise noire. Floral au travers de la violette, il peut également se révéler végétal au travers d’aromatiques mentholées ou rappelant la feuille de tomate, ou le poivron vert (les méthoxypyrazines dans le jargon) si vendangé en sous maturité.  . Acidité et tannins chez l’un comme chez l’autre auront souvent tendance à être élevés. En revanche lorsque le cabernet sauvignon présente un alcool moyen (12,-13,5% abv), l’alcool a tendance à être élevé chez le tempranillo (13,5-15,5% abv).  

  • Le choix du chêne pour l’élevage

 Bien que cela soit en train d’évoluer, historiquement, l’Espagne a favorisé l’utilisation du fût de chêne américain (réminiscence de ses relations avec l’Amérique latine). Son impact sur le vin est différent comparé au chêne français. Les deux styles de chênes contiennent tous deux de signifiant niveaux de vanilline contribuant aux arômes de vanille souvent retrouvés dans les vins ayant fait l’objet d’un élevage. L’une des différences clés est que le chêne Américain contient plus de whisky-lactone se traduisant par des aromatiques de noix de coco plus marquées. Le chêne américain est plus intense quand le chêne français a la réputation d’être plus subtil. Par comparaison le chêne français semble apporter plus de tannins au vin. À titre informatif, le prix du fût de 225 L de chêne américain gravite entre 300 et 600 euros. Le prix de la barrique de chêne français, varie entre 600 et 1200 euros. Aujourd’hui, au sein de cette appellation prestigieuse, l’usage du fût, plus modéré, s’oriente également plus vers le chêne français. Les producteurs les plus célèbres utilisant généralement 100% de chêne français. Celui-ci n’échappe pas à la règle. Découvert un mois auparavant à la Wine Paris, une nouvelle dégustation a confirmé de nouveau la stature de ce nom. L’ensemble de la gamme affiche un standing d’ores et déjà très sérieux. Le nom est relativement récent. Les ambitions elles sont claires. Devenir un grand nom de la Ribera del Duero. 


Vina Magna 6 Meses 2021  

81 Points - Velouté, structuré, hédoniste

Tout n’est que velours, l’intensité du fruit est marquée relevée par un alcool présent mettant en avant la structure du fruit. La nature des fruits est vaste, de fruit rouge mur en allant jusqu’au fruit noir confituré, on devine possiblement l’assemblage de différentes parcelles et exposition respectives afin de créer une complexité aromatique. Tout dans ce vin, et cela sera le cas pour l’ensemble de la gamme est intense. Acidité, tannins, alcool, intensité des saveurs tout est élevé. Les tannins délicatement extraits demeurent bel et bien présents avec un grain fin. Un équilibre se développe dans l’intensité.   

Finca de Altura millésime 2020. 

86 Points - Velours, du croquant au cuit, la structure s'invite

 Les aromatiques se précisent, Groseilles, cerise rouges et noires, mûre, cassis, prune noire confiturée ouvrent le bal. Les notes de vanilles, de clous de girofle et de cannelle viennent souligner les aromes primaires. Comme évoqué précédemment, tout y est intense, mais c’est peut-être l’apanage de ce terroir perché à cette altitude, marqué par d’importants contrastes quotidiens. Le toucher est soyeux, la finesse commence à se dessiner, la longueur est déjà affirmée. 

Vigna Magna 2020 Crianza  

93 Points  - Puissance et finesse au service de l'élégance

L’élevage de 12 mois en fût de chêne français révèle alors la noblesse de ce vin. Toujours dans un registre d’intensité marquée, la découverte est ici plus infusée. Les arômes s’ils sont bien présents, demeurent précis en équilibre et nombreux. Groseille, framboise, mûre, cassis, cerise noire, cassis, et violette pour ne citer qu’eux entament la conversation. L’élevage maitrisé confère une noblesse au vin remarquable. Clous de girofle, cannelle, vanille, chocolat (peut-être en provenance du merlot) s’assemblent merveilleusement bien aux arômes primaires. Le toucher au palais est d’un soyeux charmeur, la structure est puissante mais encore une fois dans un registre d’équilibre grâce à cette acidité élevée préservée par les nuits fraîches et l’altitude. Le grain des tannins très fin s’affirme néanmoins révélant le potentiel de garde de ce géant.  Une vraie découverte qui saura récompenser les plus patients. 

Vigna Magna Reserva 2020 

93 Points - Puissance, complexité, complaisance

Dégusté en bouteille (l’étiquette n’était pas encore faite, car l’élevage n’était pas entièrement complété en se référant au cahier des charges de la DO), puis au chai avant mise en bouteille


 (un peu le trajet inverse mais bon). Il semblerait que la proportion de cabernet sauvignon soit légèrement plus importante dans ce vin. Les notes mentholées mais aussi de verveine, éthérées confèrent une véritable délicatesse à ce vin que d’aucun pourrait assimiler à un bodybuilder à son apogée. Une véritable complexité variant des fruits rouges au croquant puis murs au fruits noirs de nouveaux croquant puis murs certains légèrement cuits. L’assemblage plus important (27 mois) ici n’est pour autant pas plus perceptible au nez que le vin précédent. Il est en équilibre avec les arômes primaires.  Les aromes semblent presque plus infusés. Le palais est moins nerveux que sur le crianza, plus complaisant. Si au nez l’élevage ne domine pas, au palais le vin révèle alors les notes fournies par le long élevage en fût de chêne. Tout demeure élevé, acidité, alcool et tannins n’échappent pas à la règle. En parlant des tannins, force est de constater que le grain est élégant, serré et fin. Ils s’intègrent parfaitement au vin sans pour autant s’effacer, le temps seul leur donnera la possibilité de s’apaiser. Infine, le vin est d’une qualité exceptionnelle, le seul bémol s’inscrit dans la puissance des notes conférées par l’élevage, légèrement trop marquées. Un grand vin taillé pour la garde. dans tous les cas